Coup bizarre en quinte

Publié le par jokerdeluxe

Tournoi du 05/03/2006. Tournoi mensuel ClubPoker - Hold'em no limit à 100 euros - ACF

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Sur 150 joueurs, je termine à la place lamentable de 37e (18 places payées). Comment ca s'est passé ?

.C'est simple : j'ai un tapis de 450, les blinds sont de 25-50, le tapis moyen est de 610. Je finance donc 6 tours de blinds, ce qui est maigre. Il me faut une bonne occasion, ça urge. Je la trouve en étant UTG (assis à gauche du surblindeur) et avec une jolie main :

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Je relance à 150. Tout le monde passe sauf le bouton, qui me relance all-in (il a 1.200).

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Avant de coller, je me pose la question furtive de savoir s'il est meilleur que moi. Mais cette question n'est que furtive effectivement. C'est un joueur hyper-actif, ce qu'on appelle un Chacal, à la fois large et agressif depuis le début du tournoi, qui a éliminé 6 adversaires, dont 2 en ayant J-10 assortis contre A-K. Un de ces joueurs qui font des dégâts énormes autour d'eux en cours de tournoi mais qu'on retrouve rarement en finale.

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Je me vois donc favori avec mes Dames au moment où je colle. Il abat A-J. Ca me donne raison à 70%. (Pour ma part, même avec 2,5 fois le tapis adverse, je n'aurais jamais mis le tapis avec A-J devant un relanceur de début de parole, surtout si j'ai 2 fois le tapis moyen; mais c'est sa manière de jouer.)

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Le flop est 8-3-10, dont 2 coeurs.

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Turn : 4. J’ai 93% pour moi.

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Et bien sûr, River : l’As qui me tue.

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En 30 secondes, je me lève, je lui sers la main en le félicitant, je récupère mon vestiaire et je sors dans la fraîcheur des Champs. Il est 19h.

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Je ne vois qu'une seule autre façon de jouer ce coup : faire all-in préflop. Je ne sais pas si ça aurait suffit à faire passer mon adversaire, mais vu comme il a joué depuis le début du tournoi, je le vois mal coucher son A-J. Par ailleurs, faire all-in à 450 sur un pot de 75 quand on est UTG est, au contraire, une incitation à payer pour les deux autres gros tapis de la table (2.200 et 1.800) et, comme on s'en doute, je ne voulais surtout pas qu'ils me paient.

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Ce que je voulais, c'était qu'un joueur me paie préflop, puis j'aurais ouvert all-in au flop quel qu'il soit, ce qui m'aurait fait ouvrir à peu près à la hauteur du pot. S'il était à rejouer, je rejouerais comme je l'ai fait.

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La quinte du néant

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Je voudrais citer aussi un coup assez amusant qui s'est passé au niveau 3-6. Je suis surblindeur et je possède cette main :

 

3 joueurs paient. Le blindeur passe. J'ai un tapis important (environ 250). Je pourrais relancer à 25 pour arracher le pot mais je connais dans mes adversaires, 2 joueurs larges qui en plus ont des tapis supérieurs au mien. L'un d'eux pourrait avoir la mauvaise idée de me payer avec une main aussi médiocre que K-J par exemple. Ma main est trop faible pour espérer un bon flop, donc, sagement, je checke. Comme je suis surblindeur, c’est comme si le flop était gratuit pour moi.

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Le flop : 5-5-3. J'ai un tirage ouvert à quinte. Je peux bien sûr ouvrir d'entrée, mais craignant la présence d'A-5 ou d'A-3, je ne le fais pas. J'ai quand même 3 joueurs après moi ! D'ailleurs il checkent tous. J'ai ma carte gratuite.

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Le tableau à la turn : 5-5-3-3. Ouch ! La probabilité est forte d'avoir quelqu'un à full. Je vois assez bien un joueur avec 3 se taire au flop et toucher un full à la turn, et se taire encore parce qu'il possède le deuxième full. Là encore, je checke (je ne vais pas me battre pour arracher un petit pot comme ça) et, comme je l'avais prévu, les 3 autres checkent aussi.

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Le tableau à la river : 5-5-3-3-2, sans couleur possible. Eh bien voilà, à force de ne pas la chercher, je l'ai, ma satanée quinte. Je cogite 5 secondes : j'ai la meilleure quinte mais je suis battu par le moindre 5 ou le moindre 3 qui a sous-joué le coup, tapi dans son coin prêt à faire all-in à la première ouverture adverse.

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A contrario, il est tout à fait possible qu'un joueur ait joué A-4, ce qui lui donne ici la petite quinte. Si j'ouvre et si personne n'a rien, mon ouverture est inutile, aussi inutile que si je checke. Mais si je checke et si quelqu'un a quelque chose, il va ouvrir, a priori pas cher pour faire un value bet, et je pourrai le payer, quitte à être battu par son full aux 5, aux 3 ou aux 2. Donc je checke.

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Check, check, check. Abattage. Je gagne. Un seul adversaire abat sa main, il a K-4 assortis, les autres jettent leurs cartes.

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Coup assez classique où, bien que touchant ma quinte au final, je dois jouer doucement parce que je suis très probablement battu. Et surtout, je suis premier à parler. Mais je reconnais que si quelqu'un avait ouvert à la hauteur du pot à la river, je l'aurais payé parce que j'avais les moyens et qu'il pouvait essayer d'arracher le pot avec un tout petit jeu, comme 6-6 ou 4-4 en main.

Coup aussi qui prouve l’utilité de la position en Hold’em no limit. Si j’avais été au bouton, j’aurais sans doute payé préflop avec 6-4 assortis, j’aurais peut-être ouvert au flop, mais si je ne le fais pas, j’aurais ouvert à coup sûr à la turn et j’aurais arraché le pot.

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On voit que les arguments changent du tout au tout selon l’emplacement du bouton.

Publié dans Stratégie

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