Bilan des WSOP 2007
Les WSOP 2007, une fois de plus, ont marqué un tournant dans l’histoire du poker. Mais pas dans le bon sens. Car pour la première fois, le nombre de participants au main event a été sensiblement inférieur à ceux de l’année précédente : 6.583 contre 8.600 l’an dernier (je ne rentre pas dans les détails : 1971 a été sensiblement inférieur à 1970 mais c’était pour des raisons techniques, etc.).
Les raisons sont connues : le resserrement juridique a fait que les poker-rooms en ligne ont moins organisé de satellites, et celles qui l’ont fait ont dû offrir non pas l’entrée mais l’argent aux gagnants, le plus souvent $12.000. Résultat : certains d’entre eux ont utilisé cette manne pour s’inscrire à 4 ou 5 autres tournois, sans compter ceux qui ont préféré encaisser sans venir à Vegas.
Ce coup de frein brutal remet les idées en place et nous rappelle que l’euphorie connaît toujours une limite. Il est possible que la participation de 2006 devienne un record qui tienne très longtemps. Pour ma part je trouve cela préférable car organiser un tournoi qui dure 12 jours est évidemment dantesque et unique, mais c’est délicat à gérer pour les non-pros, surtout si on est éliminé le premier jour.
Pour en terminer avec mon petit avis perso, je dirais que 10.000 dollars de 2007 équivalent à peu près à 40.000 dollars de 1970. Le bracelet du main event est comme le bac aujourd’hui : il a été dévalorisé au fil des années et le fait de le gagner n’est pas le signe qu’on est le meilleur. Si tout le monde dans l’univers du poker est d’accord sur un point, c’est bien celui-là. Dans ce domaine, le HORSE à 50.000 est bien plus représentatif et se rapproche d'un véritable combiné. Mais ne boudons pas notre plaisir, car comme suspense et comme spectacle, c’est le meilleur du poker.
La finale du main event
Aucun personnage connu dans cette finale, à part Lee Watkinson et Alex Kravchenko (photo) encore frais émoulu de son premier bracelet. Pourtant, la finale a failli accueillir un vrai poids lourd du circuit, Scotty Nguyen, vainqueur en 1998. Mais il s’est fait éliminer à la 11e place dans ses tentatives audacieuses de monter un gros tapis. La finale a été vraiment internationale puisque les pays d’origine des joueurs étaient tous différents, hormis trois qui venaient des Etats-Unis. Avec évidemment l’inévitable scandinave, décidément très présents, cette fois un Danois du nom Philip Hilm.
C’est Jerry Yang, après un tête-à-tête avec Tuan Lam, qui remporte le tournoi (attention, ce n'est pas le patron de Yahoo!, qui porte le même nom). Il a gagné sa place dans un satellite live qui lui a coûté $225. Il encaisse 8,250 millions de dollars et a déclaré qu’il en verserait 10% à des œuvres caritatives. Voilà qui nous fait enfin oublier le cauchemar de l’an dernier et du champion du monde indélicat Jamie Gold, qui a fait scandale avec son entêtement à ne pas vouloir rémunérer son partenaire.
Survol de 60 jours de folie pokérienne
Pour la première année à ma connaissance, aucun joueur n’a gagné au moins deux titres. Pourtant, il en y avait 55 à prendre ! Il y a 14 ans, en 1993, Hellmuth et Forrest en ont raflé chacun 3 (vérifique !) alors qu’il y en avait une trentaine en jeu seulement ! Cette dilution vient du nombre moyen d’inscrits aux tournois, qui a considérablement augmenté.
Voici selon moi les 7 points forts de ces WSOP, par ordre décroissant d’importance :
- Phil Hellmuth est sans conteste LE héros de cette année avec cette victoire magnifique contre 2.828 joueurs (hold’em no limit à $1.500), qui lui donne son 11e titre et le fait devancer tous les autres. Pour comparer, il a battu à peu près autant d’adversaires que Greg Raymer dans le main event en 2004. C’est dire l’exploit du bonhomme… En plus, Phil était déjà un des hommes en forme des WSOP 2006...
- Bruno Fitoussi (France) termine deuxième du HORSE à $50.000, derrière Freddy Deeb. Pour la deuxième fois, le champion passe à deux doigts de son premier bracelet (il y a deux ans, il avait terminé 2e dans un razz). Mais ne l’appelez pas Poulidor car ce gain de 1,278 million de dollars le fait passer largement premier dans l’échelle des gains cumulés français
- Erik Seidel remporte son 8e bracelet dans le Nullot deuce-to-seven à $5.000, ce qui le fait égaler l'inventeur du Hold'em jo-limit, Johnny Moss, et le place dans les prétendants pour égaler un jour le record d’Hellmuth. A part lui, seuls Chan et Brunson sont devant lui avec chacun 10 bracelets. Un coup de chapeau mérité pour ce joueur dégingandé à tête de corbeau d’une grande gentillesse, ancien pro de backgammon. il est devenu célèbre grâce à sa finale WSOP perdue contre Chan, en 1988, épisode reporté dans le film « Les Joueurs »
- Alex Kravchenko donne à la Russie son premier bracelet WSOP dans l’Omaha high-low à $1.500 (690 inscrits)… tout un symbole. Alex a déjà beaucoup gagné en Europe
- Katia Thater est la seule femme cette année à remporter un bracelet non féminin, le razz à $1.500, avec 541 inscrits. On retrouve cette pro en 5e place du tournoi féminin...
- Allen Cunningham, seul pro en finale du main event l’an dernier, décroche son 5e bracelet dans le Hold’em pot-limit à $5.000 (398 inscrits)
- Michael Keiner, champion européen, gagne le Stud à $1.500 (325 inscrits) et amène l’Allemagne au niveau de la France avec 3 bracelets
Ils ont déjà beaucoup bourlingué et ils gagnent leur premier bracelet :
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- Eli Elezra dans le Stud8 à $3.000
- Jeff Lisandro dans le Stud à $2.000 (213 inscrits)
- Robert Mizrachi dans un tournoi emblématique, l’Omaha pot-limit à $10.000
- last but not least, Ram Vaswani, l’un des meilleurs joueurs européens, dans le hold’em no limit shootout à $1.500 auquel j’ai aussi participé (voir article) ; c’est le premier membre du Hendon Mob à gagner un bracelet !
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Classement des 10 premiers Français ayant touché des prix aux WSOP :
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- Bruno Fitoussi $1.278.720
- Nicolas Atlan $190.053
- Fabrice Soulier $94.453
- Thierry Cazals $72.599
- Claude Cohen $58.570
- Elky $58.896
- Olivier Tinten $51.398
- David Benhyamine $$41.439
- Georges Djen $33.369
Souvenons-nous enfin que l’heure française vient de sonner !
Le dernier titre WSOP français est celui de Patrick Bruel, en 1998. Ca fera 10 ans l’an prochain. Donc il serait temps qu’un Hexagonal en décroche un en 2008. Car 10 ans sans titre WSOP, c’est plus long qu’un jour sans pain… Parmi les favoris : Bruel himself, mais aussi David Benhyamine, Fabrice Soulier, Bruno Fitoussi, Pascal Perrault, Elki, Fougan... et d'autres car les Français sont de plus en plus nombreux.