Mon bref passage aux WSOPE
Beaucoup de monde au Majestic pour ces WSOPE, qui est à une centaine de mètres du casino Cannes Croisette, où l’on s’inscrit. C’est normal : il y a à la fois le Day1 du PLO (Pot-limit Omaha) 1620€ et le Day2 et le Day 3 des deux bracelets précédents. Et beaucoup de gens de médias…
Pour mon emploi du temps, le PLO 1620 est idéal : démarrage jeudi à 17h, ce qui me permet de prendre l’avion d’Orly à 13h, puis retour dimanche à 13h à Paris. Et surtout, la structure : niveaux d’une heure et augmentation lente : 25-25, 25-50, 50-100, 75-150, 100-200, 150-300, 200-400, 300-600, etc. Arret de 20 mn tous les 2 niveaux, et d’une heure après le 4e niveau pour dîner. Même le tapis de départ, de 4500, est encore suffisant (M de 90).
Je tire la place 4 de la table 9. Le tournoi se déroule dans 2 salles du Majestic et pour cause : il y a 339 inscrits pour une gagne de 124K et 36 places payées.
Personne de connu à cette table, à vrai dire, que des étrangers, surtout jeunes (alors que sur les autres tables, on rencontre Johnny Chan, Lisandro, Mizzi, Soulier etc, bref que des stars). Très vite, deux agressifs se font jour : mes 2 voisins de gauche. J’aurais préféré les avoir à droite, mais bon… J’arrive à prendre un coup dans le premier tour de donne, sur un flop apparié, de ceux qui font partir l’adversaire quand on mise.
Quelques jetons circulent, rien d’énorme dans cette première heure, puis arrive un premier gros coup. J’ai AKQ9 avec une couleur et j’attaque à 75, suis payé par un des agressifs au bouton. Le flop : K54 rainbow. Evidemment je rattaque, à 150, il repaie. Turn quelconque, je checke cette fois, il checke aussi. La river amène à la fois un tirage à quinte et à couleur. Cette fois j’attaque à la quasi-hauteur du pot, 450, et il réfléchit… pour finalement payer mourant. Je montre ma main penaud (on ne sait jamais, il peut avoir QQ en main ou que sais-je), mais non : il avait 54XX pour les deux plus petites paires ! Quelle force de conviction faut-il avoir au PLO pour payer une hauteur de pot avec les deux plus petites paires quand le tableau offre autant de tirages ? Je n’en reviens pas.
Je l’observe : c’est un jeune étranger, j’ignore sa nationalité et il a un problème de bronches. Il va tenir ensuite un comportement strict : relance systématique préflop en fin de parole, et beaucoup d’hero calls qui vont marcher. C’est sans doute un génie de la lecture. Appelons-le Thor (car le Thor tue, ah ah).
Mon adversaire de gauche, lui, un cinquantenaire visiblement flambeur, passe son temps à attaquer dès qu’il a deux paires. Je me doute qu’il ne va pas faire de vieux os. A un moment donné, il attaque préflop et se fait payer par deux joueurs. Arrive le flop . Il rattaque à la hauteur du pot, il est relancé, payé par le troisième, puis l’homme sur-relance à tapis à 5K environ. Il est payé deux fois. Arrive la turn, un pique, check-check, et la river qui n’amène rien de spécial. Cette fois, l’homme à tapis abat son jeu avant les enchères. Il a la couleur max à pique, jeu max. Les deux autres se regardent, et checkent évidemment. L’un avait QQXX et l’autre, TTXX. Voilà comment, quand on flambe, on triple son tapis ! Mais il écope quand même d’une expulsion d’un tour de donne pour lui apprendre les bonnes manières. Celui avec le brelan de 10 est plutot content, car il aurait probablement payé une mise du troisième larron.
Pendant toute cette première heure, j’ai vu beaucoup de bonnes mains, genre QQT9 bicolores, 8765, etc. Mais le flop n’a presque jamais rien donné. Par exemple, je touche , je relance préflop, je suis payé par un blind, et arrive le flop . Il checke, j’attaque aux ¾ du pot, il relance… évidemment je ne peux que passer. J’ai essuyé beaucoup de coups de ce genre, avec une belle main de départ mais un flop ou une turn exécrable avec contre-attaque adverse.
Ensuite m’arrive un sale coup où j’ai quinte au Roi à la turn mais où la river ouvre la quinte max, si l’adversaire a AQXX. Je checke, il attaque, je réfléchis longuement. C’est justement mon cher Thor. S’il a touché la quinte, c’est forcément à la river, ayant juste payé à la turn. Je me dis qu’il peut aussi penser que je suis faible à la fin et qu’il peut avoir un brelan ou une quinte plus basse. Bref je finis par payer, et il avait bien AQ. Fermez le ban.
A partir de ce moment, je me retrouve avec un tapis de 2500 quand la moyenne est de l’ordre de 5500. Et je vais ramer, ramer, ramer pendant les deux niveaux suivants, grappillant quelques jetons par-ci, en perdant quelques autres par-là… d’autant que je ne touche plus de jeu du tout. Ou alors, des mains qu’il faut vraiment éviter, comme Q663 rainbow. Pendant ce temps, c’est la valse à la table. Je pense que les deux niveaux suivants ont vu à peu près 8 joueurs se faire sortir de notre table, aussitôt remplacés par du sang frais. Thor se détache nettement maintenant, il touche énormément de jeu, ce qui donne un levier à son jeu agressif par nature.
Pour ma part, j’ai été une fois à tapis avec brelan de 4 au flop, qui tient contre un double tirage à quinte/couleur. Mais je reste shortstack.
Arrive, en place 1, un jeune Anglais à la mine très sympa est avec 20K de tapis environ. J’ai vu ce qu’agressif voulait dire. Pas préflop, mais postflop. Dès que le tableau donnait une possibilité, il la saisissait, en utilisant le check-raise à la hauteur du pot. Il a fait beaucoup de mal aux joueurs conservateurs de la table. Il en a énervé plus d’un aussi, comme ce joueur qui était là depuis le début, à ma droite, et qui a finalement sur-relancé à tapis au flop avec une main double backdoor (quinte et couleur), c’est-à-dire une nullité sans nom face à un relanceur, qui n’avait que deux paires finalement… et qui gagne le coup. Le joueur éliminé n’a fait que jeter ses mains pendant plus deux heures, occupé qu’il était à tapoter sur son iPad. Si c’est pour s’envoyer en l’air avec une telle main, je ne vois pas bien ce qu’il est venu faire ici à part ajouter du dead-money…
Avant l’arret diner, au niveau 75-150, je gagne deux coups, l’un avec AAXX contre KKXX sur le flop AKXX – je le cite car je ne veux pas affirmer que je n’ai eu QUE de la malchance ! Et juste après, contre l’Anglais, là aussi un coup de chance avec la main AQT8 rainbow sur le flop A63 rainbow. Il attaque à 500, je relance à 1000, il paie. La turn est . Il attaque à 800, j’envoie la hauteur du pot, il passe. C’est ainsi que je pars au resto avec un tapis de 9K quand la moyenne est d’autant à peu près, et qu’il reste environ 170 joueurs.
L’organisation avait prévu un buffet spécial en mezzanine dans le casino, mais peu en ont profité. C’est donc dans un grand calme que j’ai pu m’asseoir à la table de… Johnny Chan et DevilFish, excusez du peu ! J’ai tenté un brin de conversation avec ce dernier, mais j’avais oublié qu’il avait un énorme défaut : son accent de mauvais garçon, l’argot et un débit ultra-rapide qui rend la compréhension très dure.
De retour au tournoi, je fais la bise à la délicieuse Vanessa Hellebuyck (qui a préfacé le live Poker No Stress) et qui va faire un parcours plus qu’honorable. A la table d’à côté, mon pote JB Bot se démène en shortstack. Il va doubler une fois, puis mourra une demi-heure plus tard avec les honneurs. Sur une autre table, un coucou à Antony Lelouche, qui monte un gros stack comme d’habitude. Et ne tarde pas à arriver Tristan Clémençon à ma table, qui salue son acolyte de Winamax Ludovic Lacay, assis juste derrière lui. Tristan s’asseoit avec 2K, une misère, qu’il va quand même doubler grâce à un jeu agressif. Il ne parviendra cependant pas au bout du 5e niveau en se faisant flinguer par une quinte contre brelan.
Vers la moitié de ce 5e niveau, 100-200, je retombe shortstack après ce coup : j’ai et je relance préflop à 500. Payé par notre ami l’Anglais. Arrive le flop . Cette fois j’ai la position, et l’homme ouvre direct à 1000. Je joue ma cote et je paie. La turn est le . Cette fois j’ai deux tirages plus la paire de 3. Il checke. Je mise évidemment, et je mets le maxi, 3K. Mais notre ami relance à tapis. Je me vois mal jouer mon tournoi sur ce coup : j’ai 15 cartes pour le double tirage, plus les deux 3 éventuellement pour me faire gagner, c’est trop peu, surtout que les 3 ne sont probablement pas bons. Je jette amèrement. Une fois de plus je me retrouve shortstack, cette fois avec le stack de départ ou à peu près. J’enclenche le mode « serré à mort » car les pots sont tous gros et malgré mon short stack j’ai encore un peu de profondeur.
Au 6e niveau, quand je touche enfin une bonne main (AAT9), je la pousse à fond et je suis payé par une paire de Rois qui ne touche rien de plus ; je double encore. Une fois encore, plus tard et sur un pot relancé, je pars à tapis avec KKXX et je gagne, cette fois sans être payé.
Vers 20 mn avant la fin du 6e niveau de 150-300, il reste 81 joueurs sur les 339 du départ et certains ont des tapis énormes : 80K par exemple. A ma table, l’Anglais et Thor sont chip-leader, avec environ 35K chacun. Moi, j’ai encore 7K, qui représentent environ la moitié du tapis moyen, et une profondeur à peu près tenable. C’est là que mon voisin de gauche, agressif depuis le début, relance à 700. Tout le monde passe et moi, au BB, je découvre . Je relance à 2100, surtout parce qu’il a un tapis assez réduit, environ 14K, mais il paie quand même (mince, j’aurais voulu qu’il passe…).
Le flop donne . Pas si mal pour moi, ce flop quelconque, surtout quand mon adversaire semble avoir de grosses cartes… J’attaque à hauteur du pot, qui est mon tapis, et il réfléchit, puis paie… Il abat un tirage à quinte et rien d’autre : . Je suis devant à plus de 60%… La turn amène un 4 qui renforce mon avantage. Mais la river donne un 5 et il fait quinte. Voilà comment je termine mon tournoi, sans ticket pour le 2e jour, tout comme DevilFish, Scotty Nguyen, Jeff Lisandro, Max Pescatori, Jennifer Harman, Davidi Kitai, JB Bot, Roger Hairabedian, Vanessa Hellebuyck...
Du bon jeu dans l’ensemble, de bons adversaires à part quelques-uns qui se font déglinguer dans les 3 premiers niveaux comme d'habitude. Je n’ai pas de regret, même s’il est vrai que ma tentative d’arrachage préflop et au flop sur ce dernier coup était un peu osée. Mais l’enjeu était de taille : gagner ce coup me faisait rejoindre le tapis moyen et allait me faire enfin jouer un PLO décomplexé, non contraint comme j’ai pu l’être depuis plus de 5 heures de jeu. Je me réjouis en tout cas que le PLO fasse de plus en plus d’adeptes, c’est un jeu qui monte et qui plait de plus ne plus. 339 joueurs qui déboursent chacun 1620 euros, c’est en effet un succès !
Les résultats du tournoi